La mémoire embaumée
La mémoire embaumée, de François BOIXIERE, aux éditions L’Orée, 2006
Onirisme et poésie constituent les subtiles miscellanées de ce charmant ouvrage. Inclassable, à « l’orée » de différents genres littéraires tels le roman historique, la poésie, voire le récit de voyage, ce livre se lit en suivant les pas d’un équilibriste sur le fil de sa mémoire. Mémoire inventée, mémoire reflet de notre propre perception d’un passé envoûtant et mystérieux.
Il s’agit d’une reine d’Egypte dont la mémoire se réveille après que sa tombe ait été profanée et son corps transporté dans la prison d’un musée. Exposée aux regards indécents des touristes, elle s’interroge sur ces derniers « qui se bousculent devant les parois de verre de son cercueil pour la regarder fixer l’éternité ».
C’est une réflexion sur la vanité de ces hommes qui prétendent « tutoyer leurs dieux », ces « épris d’infini qui partent à la conquête de leurs propres limites ».
J’ai beaucoup apprécié la première partie de cet ouvrage, ce long poème dont chaque mot est une caresse, mais j’émets une certaine réserve pour la deuxième partie durant laquelle on suit les pérégrinations étonnées et nostalgiques de la reine qui découvre notre siècle. Elles semblent être un prétexte à un récit de voyage, au demeurant intéressante vision d’une touriste qui rêverait de posséder le pouvoir de cette reine pour revenir elle-même vers cette époque troublante. Néanmoins, à cette retenue près, ce livre est à déguster comme une tasse de lait d’amande sucré au miel de Thèbes, à moins qu’il ne s’agisse de « lait des étoiles ».
Chaque gorgée se savoure le soir face à ce « soleil qui épouse le Nil, se régénère dans ses flots et, rajeuni, s’ébroue sur la cité pailletée d’or ».
Extrait :
« Je suis vide,
écrin sans consistance
d’un esprit séché par la mort,
figé dans l’inertie
des sables écoulés sans fin.
Je bascule avec désespoir,
sans appui pour me retenir,
entre temps
et souvenirs.
Appartenir au présent,
à la lumière des matins clairs,
ne sera plus en mon pouvoir.
Ma mémoire s’éveille en vain.
Les bienfaits de l’oubli
m’ont si bien gardée des remords
que je hais l’exigence
de revivre."
Cet ouvrage a été présenté lors de la session d'octobre 2011 du Café Littéraire de Lambersart.
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