Salon de la Dédicace à Moret-sur-Loing
" Et le prix du roman de la ville de Moret-sur-Loing est attribué à :
Jean-François ZIMMERMANN
pour son roman : Le mépris et la haine "
Alfred SISLEY, Moret-sur-Loing, pont, 1885
Moret-sur-Loing, 9 octobre 2016
Cette cité médiévale ne manque pas de charme. Ses remparts et ses portes fortifiées, sa rivière, le Loing, ont inspiré de nombreux artistes et les ont incités à y poser leur chevalet dont Alfred SISLEY, célèbre peintre impressionniste du 19ème siècle.
Le plus vieux bonbon du monde a été crée dans cette ville en 1638 par les sœurs bénédictines. Il s’agit du sucre d’orge.
Le salon de la dédicace organisé chaque année depuis cinq ans est un salon, disons, intime. Peu de visiteurs, mais tous des lecteurs. Les dédicaces sont nombreuses.
Et ce qui ne gâte rien, les organisateurs y sont sympathiques et attentifs aux désirs et aux besoins des auteurs invités.
Il est 10 heures. Les auteurs, une cinquantaine, achèvent d’étaler leurs ouvrages.
Nous sommes installés dans la salle des fêtes.
L’un des membres du jury du Prix du Roman de la Ville de Moret-sur-Loing se présente et me dit tout le bien qu’il pense de mon roman, Le mépris et la haine. « Le vocabulaire, le style, le respect de l’époque… ».
Il faudra attendre 16h 30 pour que le nom du lauréat soit annoncé.
Et il me faut monter sur la scène pour recevoir le prix et répondre à l’interview de Roseline Grimaldi-Hierholtz, présidente du jury :
- Une fresque historique (XVIIe siècle) de grande envergure maîtrisée par un excellent romancier. Le sujet est bien posé et les personnages ont une densité et une profondeur psychologique pleine de richesses et de vérité, dues à la connaissance de la société du XVIIe siècle dont l'auteur est imprégné.
Nous sommes en Bretagne : Tanguy Cloarec, fils du garde-chasse, est élevé avec le fils du Comte,Guy de Porcon. Ils sont nés presque en même temps et la mère de Tanguy allaite les deux nourrissons. Mais de frères de lait, il s'avère (comme on le devine confusément dès le début) qu'ils sont aussi demi-frères, le Comte de Porcon étant le vrai père de Tanguy. Et les deux enfants inséparables qui jouent ensemble et reçoivent le même enseignement d'un précepteur, vont devenir les ennemis les plus redoutables : durant tout le roman le jeune Tanguy va subir, comme bâtard, « le mépris et la haine » (titre du livre) de son demi-frère Guy de Porcon, d'autant que les deux jeunes gens sont amoureux de la même jeune fille !
Un incident où tout bascule dans l'équilibre apparent des personnages : lorsque le Comte, vrai père de Tanguy, le fait fouetter en public par son père officiel le garde-chasse ! Ce qui rend le roman passionnant et nous tient en haleine jusqu'à la fin, c'est que la vie de Tanguy nous mène d'aventures en rebondissements palpitants dans ce XVIIe siècle dont Jean-François Zimmermann nous fait partager le vocabulaire authentique et les coutumes -sans nous dérouter-, au travers d'images fortes baignées d'une poésie impressionnante : avec le jeune Tanguy et les personnages qui l'entourent, nous connaissons tout de la chasse et de ses « trucs » ; nous connaissons tout des arbres de la forêt et des futaies à entretenir ; nous vivons pleinement dans le château du Seigneur et nous visitons son « cabinet de curiosités » très à la mode à l'époque… Nous accompagnons de « vrais marins » en pleine mer, leur enrôlement, la chasse à la morue, les brimades du capitaine, la pendaison d'un matelot frondeur, la joyeuse fête débridée du passage du Tropique du Cancer ; l'attaque par la vermine (« les tarets ») qui pourrit les bois du bateau le naufrage du Marsouin dont Tanguy et Guy de Porcon seront les deux seuls survivants, rescapés sur une île déserte… Bref, nous sommes emportés à notre insu à travers les pages du livre... tout en laissant à terre de mystérieux meurtres sauvages qui finiront par être éclaircis… à la fin !
- Permettez-moi de vous poser quelques questions après la réussite de votre livre :
Pourquoi, avez-vous choisi le XVIIe siècle pour exprimer votre talent d'écrivain et de scénariste ?
- Mon premier roman, intitulé « De silence et d’ombre », dont le thème était la quête du savoir, se déroulait au moyen-âge. Étant de par nature soucieux de respecter la peinture de l’époque dont l’une des composantes est la couleur de la langue, je me suis vite aperçu qu’il me faudrait négocier avec celle-ci sous peine d’imposer au lecteur un texte quasiment incompréhensible. Je devais donc utiliser un vocabulaire contemporain truffé d’anachronismes de langage. Je menais néanmoins la rédaction de cet ouvrage à son terme, mais me jurais bien de ne jamais recommencer ! La langue du XVIIème me flattait davantage. On peut en lisser la syntaxe sans faillir à la vérité et utiliser le vocabulaire en usage sans que celui-ci pose problème au lecteur.
- Comment êtes-vous parvenus à posséder aussi naturellement les mots, le vocabulaire, les expressions, (glissés habilement dans le récit) et la mentalité de chaque classe sociale de cette époque ?
- Grâce à la lecture de textes de l’époque, de la correspondance – et l’on s’écrivait beaucoup au XVIIème ! – et à l’étude des nombreux travaux d’historiens, ils ne manquent pas !
- Comment se situe votre roman « Le mépris et la haine » dans l'ensemble de votre œuvre (5 romans qui se situent tous au XVIIe siècle) ?
- J’ai vécu plus d’un demi-siècle en Bretagne. Ces attaches n’ont pas été sans laisser des traces. Les embruns, l’eau salée, le cri des mouettes ont bercé tout ce temps passé et il est naturel que ces impressions en soient encore aujourd’hui le dénominateur commun. Même dans « L’apothicaire de la rue de Grenelle » dont l’action se déroule à Paris, la fin du roman laisse deviner quelle sera la suite de ce premier tome d’une trilogie intitulée « Le crépuscule du roi-soleil » dans laquelle j’entraîne mes lecteurs jusque dans l’Océan indien !
- Enfin, quelle satisfaction particulière fut la vôtre en achevant cette vaste fresque historique captivante ?
- J’espère bien qu’elle n’est pas achevée ! Le prochain titre sera publié en mai 2017 chez De Borée.
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